Marc Lavoine, L’homme qui ment, Fayard / Le Livre de Poche, 2015 / 2016, Paris
J’attendais beaucoup de ce petit livre, non pas à cause de son auteur bien connu, mais parce que le résumé raisonnait en moi : une histoire de famille principalement dans les années 60-70, l’Algérie, un père communiste prêt au changement. Pour faire court, des thèmes qui me parlent. Et je n’ai absolument pas été déçue, bien au contraire ! Marc Lavoine s’impose comme un écrivain à part entière grâce à cet écrit.
Marc Lavoine nous raconte son enfance, ses parents et surtout son père, son frère, ses copains. Point de départ : l’enterrement de son père, où on comprend que ce dernier, Lucien, surnommé Lulu, était un coureur de jupons invétéré et qu’il a été marié trois fois et eu trois enfants. Remontant ensuite le temps, il nous conte sa naissance, moment difficile pour sa mère qui voulait à tout prix une fille, les années où son père jonglait entre sa famille, ses maîtresses, son boulot aux PTT et son implication à la CGT, sa mère frêle et fragile, tant dans sa beauté que dans son psychisme, ses grands-parents paternels, dont le grand-père était alcoolique, et sa grand-mère maternelle qui prodiguait tant d’amour, enfin la vie d’un jeune garçon un peu gros qu’on prenait pour une fille vivant près d’Orly, qui rêvait en entendant les avions décoller et atterrir, et dont le frère Francis avait pris très à cœur son devoir de le protéger.
L’auteur réussit le pari risqué de parler de son enfance et de son père sans les dérives qui auraient pu entacher son récit : trop de sentimentalisme ou trop de jugement. Il trouve le ton juste et personnel pour parler de tout cela, ses maux et ceux de sa mère et de son frère, et même ceux de son père : l’Algérie, l’alcoolisme du grand-père, puis la mort de ses parents, la désillusion des communistes après 1981.
Marc Lavoine nous montre réellement qu’il est un bon auteur tant ses mots sont choisis avec soin et font mouches. L’émotion est là, elle englobe le lecteur qui est pris dans le récit. On assiste à une espèce de discussion entre un fils et son père, l’auteur prenant Lulu à parti, en l’appelant d’abord justement « Lulu », et en utilisant le tutoiement pour s’adresser directement à lui. Cela rend le récit d’autant plus fort, sans pour autant que le fils juge le père, et ce malgré sa vie décousue qui a forcément marquée ses enfants. On assiste à des scènes ubuesques qu’on n’imaginerait jamais faire vivre à des enfants. Cependant, on parvient à apprécier Lulu, ses mots forts et drôles, on compatit avec lui, bien que les excuses qu’il se trouve restent faibles au vu de la situation. Dans chaque mot de Marc Lavoine, on sent clairement le pardon, l’acceptation, l’admiration pour un père pas comme les autres, l’amour pour une mère fragile, qui a su que bien tard les écarts d’un mari qui ne cachait rien à ses propres enfants.
C’est aussi la chronique d’une époque, principalement les années 70. On sent une vague de liberté, d’amour et d’espoir. De par d’abord les idées du père, la liberté d’éducation, les copains des enfants accueillis chez eux, certains s’y installant, mais aussi l’accord des parents pour les souhaits d’avenir des fils, désirant embrasser des carrières artistiques pour le moins incertaines. Marc Lavoine retranscrit donc l’histoire d’une époque, il prend le pouls d’une France qui souhaite se réinventer.
C’est un livre fort que nous propose Marc Lavoine, plein de nostalgie, où on sent tout l’amour d’un fils pour son père, d’un fils pour sa mère, d’un enfant pour son frère. Bien écrit, court et palpitant, bien rythmé, ce livre de cet auteur bien connu par ailleurs est une petite pépite que je vous conseille vivement de vous procurer et de dévorer.
Ma note : 5/5
Je suis amoureuse de Marc Lavoine (chuttt) donc j’ai ce livre dans ma PàL… et je suis ravie de lire ta chronique, car je pense que je l’aimerai aussi ce bouquin… Merci 🙂
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