Jack Kerouac, Sur la route , le rouleau original, Folio, Paris, 2010
Sur la route, le rouleau original, c’est une oeuvre emblématique du XXe siècle et surtout de la beat generation. Jack Kerouac raconte dans cet ouvrage son – ou plutôt ses – road trip à travers les Etats Unis, et à travers cela, sa relation avec Neal Cassady. Il a écrit cet ouvrage en 6 semaines, le rouleau est actuellement exposé à Paris, au Musée des lettres et des manuscrits. Ce n’est pas cette version qui a été éditée en 1957, mais bien une version “assagie”, où les noms des personnages ont été changés. Le rouleau original a été traduit très récemment, et c’est donc de cette version dont je vais vous parler.
Je n’essaierai pas de résumer cet ouvrage tellement ce serait si peu lui rendre honneur. L’histoire est tellement dense et les personnages y foisonnent. Pour schématiser vulgairement, je peux quand même dire qu’il s’agit de l’histoire d’un jeune auteur new-yorkais, Jack Kerouac, qui vient de perdre son père , et qui décide de rejoindre des amis qu’il a rencontré à New York dans l’Ouest américain, dont le fameux Neal Cassady. C’est en tout cas le point de départ de cet ouvrage, qui prend place à la fin des années 40. Il effectuera plusieurs voyages sur la route, rencontrera énormément de personnes, trouvera le moyen de traverser plusieurs fois les Etats-Unis et même d’aller au Mexique avec très peu d’argent en poche, dans un désir de liberté intense.
Je ne sais pas ce qu’il en est de la version de 1957, mais la lecture de cette version est une expérience assez intense. Comme le rouleau original, c’est 458 pages de textes sans un seul retour à la ligne, aucun autre espace que ceux qui séparent les mots. Aucun paragraphe, aucun chapitre, le roman est néanmoins divisé en livres, mais cela n’influe absolument pas sur la mise en page. C’est dense, on est entraîné par le phrasé de Kerouac, ce phrasé rapide, impétueux, comme un torrent qui ne nous lâche plus jusqu’à la fin.
Pour le plaisir, voici un extrait qui nous montre bien le désir de liberté des protagonistes, ainsi que le style de l’auteur :
““Non mais regarde-moi-les, les autres devant… Ils s’inquiètent, ils comptent les kilomètres, ils se demandent où ils vont coucher ce soir, et combien il faut pour l’essence, quel temps il va faire, comment ils vont y arriver… alors que de toute façon, ils vont y arriver, tu vois. Mais il faut qu’ils s’en fassent , ils seront pas tranquilles tant qu’ils n’auront pas trouvé un tracas bien établi et répertorié ; et quand ils l’auront trouvé, ils prendront une mine de circonstance, un air malheureux, un vrai-faux air inquiet, et même digne, et pendant ce temps-là la vie passe, et ça AUSSI ça les tracasse indéfiniment. Écoute ! écoute !” il a dit en les imitant, “ “Euh, bon, euh, c’est peut-être pas une bonne idée d’aller prendre de l’essence à cette pompe, parce que voilà, j’ai lu récemment dans Pétroleum que dans leur essence y mettent beaucoup de MELASSE, on m’a même dit comme ça qu’ils y auraient mis un LOIR, euh moi je sais pas, mais ça me dit pas d’en prendre là” Tu vois d’ici, mec.”” (Édition Folio 2010, pp. 456-457)
Ce livre, c’est un tour de force, on est entraîné malgré nous sur cette route, à un rythme effréné, comme les personnages. Cette manière d’écrire, rapide et vive, nous entraîne dans l’univers de Jack Kerouac et Neal Cassady, dans leur frénésie, dans leur voyage initiatique. A travers leurs voyages, leurs découvertes, leurs aventures, on vit cette expérience pleinement. Quand j’ai fermé le livre, j’étais presque essoufflée, comme si moi aussi je venais de terminer « ma vie sur la route ». Vraiment un livre puissant !
Ma note : 4/5
Une adaptation cinématographique de Walter Salles est actuellement en salles et a été dernièrement présenté à Cannes. Je ne l’ai pas encore vu, j’améliorerai donc cette petite note dès que ce sera fait afin de vous donner mon ressenti.
La bande annonce :